
L’année gastronomique est rythmée par quelques temps forts. L’ouverture de la Chapelle en est un, marqué par le retour sur la terre ferme du duo Mensa. Après quelques saisons isolés sur une île, perchés sur leur fortin battu par tous les vents, Romain Nicoli et Sébastien Dugast ont jeté l’ancre au premier étage de cette vieille bâtisse voisine de Saint-Victor. Au rez-de-chaussée, toujours occupé par la Velada, était le réfectoire des moines de l’abbaye. Tout en haut des escaliers, il y a cette chapelle oubliée de tous, dont les murs peints en trompe-l’œil datent du pontificat de Léon XIII. On y boit désormais un Petmouth (vermouth et pet’nat’) et une Goxoa (bière à 0°) à la lumière des chandelles.

Le duo Dugast-Nicoli, messes basses et haute cuisine
En salle, le comptoir et les tables de bistrot ont été conservés, ces dernières nappées de blanc en harmonie avec les chaises viennoises by Thonet. Verres à vin et Duralex cohabitent avec des couverts argentés, tous les codes du speak easy du resto de nuit sont réunis. Théo shake au comptoir, sert, met de l’huile dans les rouages. C’est la première célébration à la Chapelle et tout le monde semble fréquenter les lieux depuis toujours. En communion avec ses ouailles, Sébastien Dugast joue du style terre-mer avec précision. Cœur de canard en brochette-racines de persil et sauce tonkatsu 3 ans d’âge ou simple cromesquis de homard : c’est calibré, jamais tapageur, élégant, de bon goût. Chaque assiette vibre au rythme d’assaisonnements réfléchis (crudo de thon-main de buddha et caramel au vinaigre de cidre), entre acide sirupeux et piment chaleureux.




La Chapelle, cuisine inspirée
Le style la Chapelle s’exerce ensuite sur un paleron de bœuf braisé fondant comme du beurre, mâtiné au gel de bières et porté par des légumes racines, jus réduit. L’encornet farci aux moules et riz de Camargue dégage un discret arôme carbonné, vite balayé par la rondeur du riz et le sel d’un jus de cochon concentré. Les tables se garnissent, les desserts défilent : une raviole de mangue cache un exceptionnel crémeux passion un peu dans l’esprit d’un lemon curd. Le minestrone de fruits exotiques apporte fraîcheur et légèreté. Un dessert qui, pour être d’une présentation assez plate, surprend par sa vivacité et sa gourmandise.

Alors faut-il glisser son missel en poche avant d’aller à la Chapelle ? Nul besoin, la carte des cocktails suffira : un espresso Martini avant de partir ? Sébastien et Romain n’ont jamais été aussi convaincants que cet automne. En ces temps incertains, la cuisine est rassurante mais s’autorise quelques petits pas de côté toujours avec intelligence, jamais d’arrogance. Tout sonne juste, même les tarifs qui permettent de passer une heureuse soirée sans pleurer le lendemain chez son banquier. On part le cœur léger, la vie semble belle et les soucis ont été oubliés. C’est rare qu’un restaurant vous mette dans un tel état, non ?
La Chapelle, 31 rue d’Endoume, Marseille 7e arr. Infos et résas via Insta







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