
Tout le monde connaît la formule « Marseille, une ville antique sans antiquités » tant, au fil des époques, cette ville a développé un certain génie pour gommer les traces de son passé grec. Aujourd’hui encore, trouver un restaurant grec dans ses rues relève de l’impossible défi, à l’exception d’une seule adresse. Ioannis Nternova et sa compagne Lea ont été guidés par leur bonne étoile qui les a installés… avenue de Corinthe. Ça ne s’invente pas. Hemera en est à ses premières semaines et le duo voit l’avenir en bleu et blanc. « Hemera était une déesse primaire dans l’Antiquité grecque, elle incarnait la lumière, c’était du temps des Titans, avant que Zeus ne les renverse pour devenir le dieu des dieux », raconte Lea.


Gastronomie grecque
En cuisine, installée sur une mezzanine qui domine la salle, Ioannis Nternova a décidé de proposer une carte grecque contemporaine, débarrassée de tout folklore, une cuisine mâtinée d’influences françaises. Bien qu’ayant travaillé en Crète, à Mykonos et à Athènes, le chef garde un beau souvenir de ses années parisiennes chez David Toutain** ou Raphaël Rego*, emmenant dans ses bagages à Marseille, secrets techniques et autres arts des assaisonnements. « Marseille, c’est ma vie, j’ai toujours bougé par passion et je suis venu à Marseille pour Lea », confie-t-il. Comme les vagues qui viennent s’échouer sur le sable d’une plage de Crète, les ingrédients et allusions à l’île natale se succèdent : la vision d’un chef qui donne à goûter la gastronomie de son pays d’aujourd’hui a quelque chose d’émouvant.


On picorera quelques olives de Kalamata, on trempera son pain dans un très raffiné tarama aux œufs de truite et huile aux herbes. Le repas peut débuter avec un panier de légumes de saison, un assortiment qui mélange le cru-cuit, l’émulsion d’huile d’olive-citron ensoleille les courgettes, aubergines, navets, carottes, potiron et autre artichaut. Une recette qui se décline tout au long de l’année, au gré de ce qu’offrent les potagers. « On utilise beaucoup cette sauce sur les poissons, explique notre serveur. C’est le plat préféré du chef ». Le secret des tentacules de poulpe passe par une immersion dans le vinaigre avant une cuisson à la plancha. Posés sur une purée de fèves jaunes de Santorin, ils dégagent une finesse rustique plaisante, les assaisonnements sont hissés au sommet. A la façon d’un rizotto, l’orzotto de gambas est lié à la bisque aromatisée au vin blanc demi-sec, « c’est excellent », avait assuré le serveur qui, décidément, vise juste à chaque fois.

Hemera, c’est la Méditerranée
On aurait pu clore le déjeuner par des loukoumades (petits beignets ronds au miel-sésame et glace vanille) mais le chocolat au pain-éponge noisette et crémeux noisette évoque par certains côtés la gastronomie hellène des années 1950, quand la famine poussait les familles à la créativité. Irréprochable ganache chocolat arrosée à l’huile d’olive et scintillante de fleur de sel.
Cuisine de l’émotion et des souvenirs, le travail de Ioannis Nternova s’appuie avant tout sur des produits irréprochables et authentiques. Vous serez surpris par le caractère novateur de ses recettes qui sont celles des îles et du Peloponèse réunis. De l’Asie mineure à la France, Hemera revendique une histoire méditerranéenne, une cuisine nourricière et sophistiquée. Le restaurant à tester pour comprendre un peu l’ADN gastronomique de la Marseille d’aujourd’hui.
Hemera, 23, avenue de Corinthe, Marseille 6e ; infos au 04 91 25 18 38. Déjeuner 26 et 31 €. Carte 50-55 €.
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